Épisode 5 - Se libérer dans son écriture avec Frédéric Ciriez

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Assez parlé par l'école d'écriture Les Mots

Arts


Frédéric Ciriez est un incontournable de l’école d’écriture Les Mots puisqu’il anime des ateliers depuis la création du lieu. Actuellement, il propose un atelier à partir du 23 mars sur le thème “Lire et écrire aujourd’hui” : une heure pleine d’écriture hebdomadaire pendant laquelle les participants sont amenés à jouer avec les codes des genres contemporains, le roman noir, la littérature blanche, le roman érotique, le récit autobiographique... Après quelques séances d’exercices, ceux et celles qui le souhaitent pourront se lancer dans un vrai projet de roman plus étoffé, en s’appuyant sur les conseils attentifs et personnalisés de Frédéric Ciriez.  Dans ce podcast, Frédéric Ciriez présente ses ateliers d’écriture bien-sûr mais aussi son rapport vital à la lecture et à l’écriture depuis l’enfance. Écrivain follement créatif, inventeur d’univers débridés que la presse acclame et qualifie souvent de “baroque”, auteur d’un film à succès (“La loi de la jungle” avec Vincent Macaigne) et de trois romans aux éditions Gallimard (collection Verticales), Frédéric Ciriez se confie ici sur ses premiers pas d’écrivain, sa première déception et raconte quelle a été sa clé personnelle pour se “libérer” dans son écriture. Parmi les très nombreux conseils qu’il donne aux jeunes écrivains dans ce podcast, il explique notamment toute la persévérance dont il faut faire preuve face au monde de l’édition, une vraie “machine à dire non”. Création et réalisation : Lauren Malka. Musique : “Machine à écrire” Paroles : Louise Pressager / Musique Ferdinand Identité graphique : Nina Jovanovic. Direction générale : Elise Nebout.  Extraits lus : “”BettieBook” (Collection Verticales, Gallimard) Paru le 04-01-2018  Mélange de deux extraits : pages 70 et 76, 77 “Je suis au lit. Je pense. Le mot écrivain est prétentieux, souvent ridicule, comme une revendication désespérée ou une déclaration honteuse. « Critique littéraire » fait anachronique, arbitre des élégances perdu dans une soirée électronique de la Nouvelle Athènes, Paris IXe . Le mot chroniqueur, plutôt terre-à-terre, résiste à l'épreuve du temps, glissant de l'événement à la marchandise, de Joinville à Cultura.Le mot auteur se révèle fonctionnel, productiviste, trans-disciplinaire, informe, statutaire, sans caractère ni contour, abject. J'aime de plus en plus le mot booktubeuse, imagé, agrégatif, mutant, neuf, numérique, en phase avec le temps, attaché à Bettie” (page 70) (...)   “Je dis à Bettie : « Dessine-moi un manifeste. » Elle dit : « Un quoi ? » Je lui dis : « Dis-moi pourquoi booktubeuse c'est ta life à toi et à tes copines. » Elle dit : « Ah, ok ! » Elle se met face à moi et se transforme en BettieBook : « Attention la Toile, les booktubeuses arrivent et font le buzzzz ! On est nombreuses et on sait ce qu'on veut. On est là et on nous délogera jamais de la maison des Livres ! On est une, puis on est deux, on se multiplie comme les petites souris partout où il y a du texte à grignoter. On est les lectrices d'aujourd'hui, au plus près des fans qui nous kiffent. On est le nouveau monde ! » Elle s'arrête puis me demande : « C'est ça un manifeste ? » Bettie me dit : « Prends ma place, essaye. » Je lui dis : » Je sais pas... » Elle insiste : « Allez, comme ça tu vas tester la critique en vidéo ». Elle s'assoit à côté de moi, dans le canapé. « Je te regarde ». Je me lève, me place face à l'objectif, commence une impro. « Salut à tous, bienvenue chez Bettie de BettieBook qui me fait l'honneur de me laisser m'exprimer aujourd'hui sur sa chaîne... La critique littéraire écrite est en mauvaise santé et va bientôt être remplacée par la critique vidéo... Non, ce n'est pas une dystopie comme celles qu'affectionne Bettie, c'est le présent, et il fallait bien qu'un jour ce soit un critique littéraire de l'ancien monde qui le reconnaisse... Voilà, c'est la lutte des classes, moi et les miens on a perdu, mais la littérature va se venger... » Bettie rit : « Bon, tu rames un peu, mais la critique vidéo ça s'apprend. Peut-être que ça te stresse qu'on te voit, c'est pas de la radio. » Je lui dis : « Même à la radio maintenant on te filme. » Elle ajoute : » Je vais poster ça sur le web, la planète va recevoir tes confidences. » Je lui dis : « Si tu fais ça, tu n'iras pas à Los Angeles. » Je m'assois près d'elle. Soudain on s'embrasse. (pages 76 et 77)