Les dessous de l'infox, la chronique - Le vaccin anti-polio dans le viseur des anti-vax

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Les dessous de l'infox, la chronique

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Quelques semaines après que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a annoncé l’éradication de la polio sauvage en Afrique, l’information de nouveaux cas dérivés du vaccin antipolio vient semer le doute sur les réseaux sociaux. Les antivax affirment que la vaccination est directement responsable d’une nouvelle épidémie mortelle en Afrique. Information erronée. « Bill Gates refile la polio aux Africains », c’est le titre d’une vidéo abondamment partagée sur toutes les grandes plateformes. Son auteur suivi par 28 000 abonnés sur YouTube accuse le philanthrope américain d’être directement responsable d’une nouvelle épidémie de poliomyélite. Dans les commentaires et les retweets de la vidéo, on peut lire des commentaires appelant à traduire Bill Gates en justice pour crime contre l’humanité. À l’appui de sa démonstration, l’auteur de la vidéo cite un article publié le 29 août sur le site de RFI, qui relate effectivement la détection de nouveaux cas de poliomyélite au Soudan, en Ethiopie et au Tchad à partir d’une souche vaccinale. Mais l’auteur de la vidéo s’arrête au titre et ne dit pas comment se fait la contamination. Il laisse entendre que les personnes touchées sont vaccinées, ce qui n’est pas le cas. Quant aux responsabilités de Bill Gates et de sa fondation, il est effectivement l’un des principaux bailleurs des campagnes de vaccination contre la polio, à travers la Global Polio Eradication Initiative (GPEI). Si l’on ne peut totalement dédouaner cette organisation des nouveaux cas de contamination, il faut d’abord mentionner qu’elle a permis de réduire de 99 % le nombre de cas de polio dans le monde. Éradication confirmée de la polio sauvage Pour s’en tenir aux faits, ce que l’OMS annonce le 25 août dernier, c’est l’éradication du « poliovirus sauvage » du continent africain. C’est une grande victoire sur cette maladie mortelle, qui continue cependant de sévir sous cette forme en Afghanistan et au Pakistan, mais plus en Afrique. Pourtant, une semaine plus tard, une information vient semer le trouble : l’OMS reconnaît que de nouveaux cas de polio sont recensés au Soudan, en Éthiopie et au Tchad. Il s’agit de contaminations par un « poliovirus dérivé d’un vaccin ». Selon l’OMS et le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (Ocha), aucun décès n'est alors enregistré, mais à la mi-septembre, 23 cas de paralysie sont recensés chez des enfants de moins de cinq ans. Cependant, là où les articles des antivax ont tout faux, c’est que les enfants contaminés ne sont pas des enfants vaccinés. Cas rarissimes de mutation du virus Les explications fournies à l’Agence France Presse (AFP) par le docteur Richard Mihigo, coordinateur des programmes d’immunisation et de vaccination de l’OMS en Afrique sont très claires. Les nouveaux cas sont dus à une mutation rare du virus contenu dans le vaccin. Ces « poliovirus circulants dérivés d’un vaccin » (PVDVc) sont distincts des poliovirus dits « sauvages ». « Le vaccin est constitué d'un virus dont la virulence a été atténuée pour qu'il ne puisse induire une maladie. Lorsqu'il est administré par voie orale, [...] il y a ensuite une excrétion du virus vaccinal par les selles. » Dans des zones où les conditions sanitaires sont mauvaises, il arrive que ces virus excrétés circulent. Les enfants acquièrent parfois au contact de cet environnement une « vaccination passive ». Mais « dans des cas extrêmement rares, ce virus de souche vaccinale peut muter, redevenir virulent, et déboucher sur des complications, causer des paralysies ». Sur dix milliards de doses administrées depuis 2010, 1 271 personnes ont été contaminées par cette souche vaccinale, contre des centaines de milliers de cas évités grâce au vaccin. Néanmoins, un nouveau vaccin a été développé, plus stable, pour éviter la mutation et la circulation de souches vaccinales du virus de la polio. Richard Mihigo assure qu'il « sera introduit progressivement d’ici fin septembre, début octobre, pour lutter contre les épidémies liées aux poliovirus dérivés de la souche vaccinale et remplacer à terme le vaccin actuel tel que nous le connaissons ». Le problème, c’est que les infox sur la vaccination, la désinformation répandue à dessein par les antivax, risquent d’éloigner les populations du vaccin. Or, c’est précisément dans les lieux où la couverture vaccinale est insuffisante que certaines personnes ont pu être contaminées. Pour nous signaler les infos douteuses circulant sur les réseaux, que vous souhaitez vérifier, le numéro whatsApp « Les dessous de l’infox » : 0689076109.