Reportage Afrique - Madagascar: histoire du litchi gasy (série 3/3)

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Suite et fin de notre série sur le litchi malgache. Tous les ans, 2 à 3 week-ends avant Noël, le litchi malgache, récolté à la mi-novembre, se retrouve sur les étals des primeurs européens. Un marché de niche dans lequel Madagascar règne en maître, avec ses plus de 15 000 tonnes exportées chaque année. En tant que premier producteur de l’hémisphère sud, il est le seul pays au monde à pouvoir proposer en quantité des litchis qui égayeront les tables des fêtes de fin d’année.   Ce commerce, relativement récent, doit son existence à une variété introduite au 19e siècle qui s'est parfaitement acclimatée à la zone tropicale humide de la région de Tamatave, sur la côte est de l’île. Aujourd’hui, 96% des litchis exportés proviennent de cette région. Retour sur l’histoire du litchi à Madagascar. D’après les scientifiques, le premier pied de litchi a été introduit à Madagascar en 1802 par le botaniste français André Michaux, dans sa pépinière d’arbres fruitiers exotiques créé à Isantrana, près de Tamatave. Ce sont ensuite les colons créoles et asiatiques, dans les années 1940, qui ont multiplié cette espèce, - qu’ils connaissaient-, sur tout le littoral. « On est sur une variété qui s’appelle la Kwai Mee. Une variété solide, qui supporte bien le transport. » Michel Jahiel, docteur en agronomie, chercheur au Cirad, est à la tête du CTHT, le Centre technique horticole d’appui au développement de la filière litchi. « La floraison du litchi est basée sur une baisse de température. L’induction florale se fait ici grâce à l’hiver austral qui commence au mois de juin. Quand la température descend en dessous de 17°C, la variété ici, qui est très sensible, fleurit. Il y a des variétés qui ne fleurissent qu’une fois tous les 3-4 ans en fonction de ce choc. Ici à Madagascar, la chance qu’on a, c’est que tous les ans 90% des arbres fleurissent. » Un rendement assuré qui pousse les Malgaches à se lancer dans le commerce international. La première exportation a lieu par avion, en 1960, direction l’Europe et ses riches consommateurs d’origine asiatique. En 1987, l’Union européenne autorise l’importation de litchis traités au dioxyde de soufre, un puissant fongicide qui permet une conservation longue (plus de 4 semaines). Un tournant pour Madagascar qui se lance alors dans l’exportation de gros volumes par bateau. Pourtant, malgré la demande croissante, la manière de cultiver le litchi n’évolue presque pas. Aujourd’hui encore, pas de vergers mais une multitude de petits paysannats éclatés sur 250 km de côtes. Cet agriculteur est l’un des 30 000 petits producteurs qui participent à cette incroyable logistique. « Je cultive principalement du riz, des grenadelles, du corossol et un peu de litchis. » Lui a 10 pieds de litchis. Il revend la totalité de sa production à un exportateur. Un complément de revenus conséquent et facile à obtenir. « L’entretien pour que le litchi produise, c’est très simple. Il suffit de nettoyer autour du pied et de veiller à tailler les branches de temps en temps. Voilà c’est tout. La pollinisation, la floraison, tout se fait tout seul. Ça ne demande pas autant de travail que les rizières, qui doivent être entretenues tous les jours. Et quand arrive le moment où l’arbre donne des fruits, on les cueille et on les vend. » Problème, pour le chercheur du Cirad, la filière s’est structurée exclusivement en aval, autour d’une date fixe, Noël. « L’idéal, c’est d’arriver tôt sur les marchés européens. Seulement, on a affaire à une plante, qui, elle, ne peut pas fonctionner de façon régulière et systématique. La floraison peut varier sur une échelle de temps de 4 semaines. » Malgré l’opération logistique extrêmement rigoureuse mise en place depuis des années pour exporter le fruit, le litchi reste avant tout un végétal, qui n'a de maître que son environnement. Ainsi, alertent les chercheurs, une hausse des températures induite par le changement climatique pourrait à elle seule faire vaciller la filière.