Reportage international - Mexique: ce que la dépénalisation de l'avortement par la Cour suprême implique

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Mardi 12 octobre, au Mexique, les mouvements féministes vont manifester un peu partout dans le pays pour la légalisation de l’avortement. Cette fois, les mobilisations auront lieu dans une ambiance plutôt festive suite à la décision historique adoptée le 7 septembre par la Cour suprême qui, à l’unanimité, a déclaré inconstitutionnelle la criminalisation de l’avortement.  Martha Patricia avait 19 ans lorsqu’elle a été hospitalisée pour des complications liées à un avortement. Cette jeune femme originaire de l’État de Veracruz, au Mexique, ne s’attendait pas à ce que les médecins la dénoncent à la police. Ils lui ont dit qu’elle avait tué son enfant et qu’elle aurait de graves problèmes. « Les médecins m’ont installée sur un lit et j’étais entourée de policiers qui m’interrogeaient. Personne ne me soignait, mon état de santé ne les intéressait pas, raconte-t-elle. Après, ils m’ont obligée à demander pardon au fœtus, que j’avais tué selon eux. Ils ont fait germer en moi un sentiment de culpabilité. Et quand je suis sortie de l’hôpital, j’étais prête à aller droit en prison, je pensais que je devrais payer pour ce crime. » ► À lire aussi : Mexique : la Cour suprême juge inconstitutionnelle la criminalisation de l'avortement Aujourd’hui âgée de 25 ans, Martha Patricia a passé les six dernières années dans l’attente d’une sanction judiciaire. Elle a pu échapper à la prison, mais ce n’est pas le cas de 200 autres femmes mexicaines qui sont actuellement derrière les barreaux pour avoir avorté. Elles vont être libérées prochainement, d’après Melissa Ayala, avocate du Groupe d’information sur la reproduction volontaire (GIRE), une organisation féministe : « Les femmes ne doivent plus avoir peur d’aller en prison si elles avortent, elles ne doivent plus craindre d’être punies. Et par conséquent, ce sera décisif pour rompre avec la stigmatisation sociale. Le fait que les juges disent aux médecins que même s’ils dénoncent, il n’y aura pas de poursuites pénales, je pense que cela aura un impact sur leur attitude à l’avenir. » Dans un pays majoritairement catholique, les juges de la Cour suprême ont décidé qu’il ne s’agissait pas d’une question d’opinions ou de croyances, mais de droits des femmes. « Je crois que la décision de la Cour suprême représente un pas historique : les juges mettent enfin de l’ordre dans ce désastre juridique qui prédominait sur l’avortement, et ils ne laissent plus interférer des croyances ou des idéologies dans les lois », salue Verónica Cruz, fondatrice du centre Las Libres, à Guanajuato, une organisation qui accompagne les femmes qui désirent avorter. La Cour suprême mexicaine a aussi invalidé la possibilité pour les législateurs de protéger la vie depuis le moment de la conception. Martha Patricia, quant à elle, se dit « libérée ». Et les militantes féministes s’attendent à voir déferler sur le pays une vague de lois en faveur de l’avortement, une véritable « marée verte ».